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quantité d encre de Shô nécessaire à...
Comme c est original... Vous voulez m épouser, tous les
deux, voilà qui ne manque pas de saveur.
Non, juste moi », annonçai-je d une voix trop faible.
L Impératrice déroula hors de sa bouche cornée une langue
longue comme mon bras, puis la ravala en la faisant claquer,
aspergeant de salive ses coussins et l un des piliers sculptés de
sa couche.
« Enlève ton masque que je puisse contempler le visage de
celui qui veut devenir mon époux. J imagine que c est pour être
le père du prochain Empereur et non pour honorer ma beauté
intérieure et extérieure. »
Je m exécutai sans faire de commentaire, posant le masque
à mes pieds. Aussitôt, elle éclata de rire, un rire de grotte qui
s effondre et dont les stalactites volent en éclats, un rire dans
lequel grondaient les rocs d un mépris insondable.
« Tu es laid ! Vraiment très laid. Remets ton masque, à dire
vrai cela te sied. »
Comparé à elle, j étais un modèle de beauté, ce que j aurais
bien aimé lui faire remarquer. Mais je préférai me taire, car je
l imaginais facilement occupée à me dévorer vif ou à
m enfourner de force dans son sexe géant, gouffre de
l inassouvi, puits de tous les maux.
« J accepterai que le vagabond me demande en mariage,
m annonça-t-elle. J ai envie de lui dire oui. J aime son odeur, on
dirait qu il a baisé des truies et brouté de la petite vérole toute la
nuit. J apprécie sa beauté sauvage et la puissance de son regard
noir. Il sent l expérience de la débauche permanente et peut-
être acceptera-t-il que je fasse aller et venir son corps tout entier
entre mes cuisses. »
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Musashi leva la tête :
« Jamais au cours de mon errance plus grand honneur ne
m a été fait, dit-il, mais je ne puis vous épouser. Ça m est
impossible, j appartiens à la voie que j arpente. C est la Voie du
Sabre et nulle autre. Elle ne permet ni le mariage ni l exercice
prolongé du pouvoir. Je suis ici pour accompagner mon élève,
rien de plus.
Hors de ma vue, vagabond ! Fuis avant que je ne te
dévore vif. Tu oses refuser un mariage que je n avais proposé à
nul autre. Ta stupidité est sans fond, tel le noir de tes yeux.
Cela a toujours été le cas. Votre perspicacité n a pas
d égale et l élève vous sera bien plus utile que le maître, il est la
sève qui monte alors que la mienne s assèche. »
Sans attendre plus avant, Musashi quitta la pièce en
reculant, agenouillé pour atténuer la grossièreté de sa fuite.
J allais faire de même quand l Impératrice s adressa à moi :
« Reste ici, Démon ! Je crois que sur un certain point, ton
maître n a pas tort, et il est une chose dont je veux te parler. »
Je hochai la tête pour l inviter à poursuivre.
« Mon père a de grands projets pour l Empire. Il en a
toujours été ainsi. Il voit loin, beaucoup plus loin que ses
ancêtres : au-delà des horizons, au-delà des mers, au-delà du
Continent-Éléphant. Il aimerait envoyer une mission
diplomatique en Europe, afin d y apprendre tout ce que l on
peut y apprendre, notamment les secrets de cette magie que les
Portugais appellent l alchimie. L ennemi dont on ne sait rien est
le plus dangereux de tous et l Europe a beau être lointaine, elle
n en demeure pas moins une menace. J aimerais que tu me
dises si tu es intéressé par ce projet. »
J acquiesçai, incapable de parler.
« Reviens demain, avec toutes tes possessions. Je te
présenterai les hommes qui seront sous ton commandement et
celui qui te commandera, un des samouraïs de mon père :
Yoshishige Araki. Je t expliquerai pourquoi tu seras l assassin
dont a besoin cette mission. »
Après avoir récupéré mon érable, je quittai le Palais et me
mis en quête de l échoppe où Musashi avait remarqué l enfant
qui n appartenait à personne. La fille-mère m y attendait, assise
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sur un tatami à la saleté exemplaire. Elle donnait le sein à son
enfant et chantonnait dans une langue que je ne connaissais
pas. Tout en continuant d allaiter la chose fragile qui était
récemment sortie d entre ses cuisses, elle me prépara des
nouilles aux tripes de porc et aux champignons. Le contenu du
bol sentait la merde, mais avait plutôt bon goût.
« Il a dit que tu repasserais.
Qu a-t-il dit d autre ?
Qu il regrettait de ne pas avoir su te montrer la Voie. Rien
de plus.
Il est parti avec l enfant à la main malformée ?
Oui... Va-t-il lui faire du mal ?
Je ne crois pas... Il a un sens romantique, quelque peu
désuet, des choses justes. »
Je posai mon bol vide et lui donnai de l argent. Elle regarda
la pièce d or et me sourit.
« Tu ne veux pas rester ? » me demanda-t-elle alors que
l enfant se désintéressait de son sein lourd de lait, à l aréole
disproportionnée.
« Rester ?
J ai besoin d argent... pour mon fils. Je sais faire, je fais
bien. Le rônin n a pas voulu rester. »
En la regardant, si jeune et depuis si longtemps déflorée, je
me souvins des putains que j avais maltraitées sur la jonque des
plaisirs et aussi de cette vision atroce, celle du sexe palpitant et
démesuré de l Impératrice-Fille.
« Je ne peux pas », lui dis-je en frissonnant de dégoût.
Elle se jeta à mes pieds et m implora de rester.
« ... sinon ils vont venir, comme chaque nuit. Ils me
prennent et me laissent en sang avant l arrivée du matin. Ils me
font si mal... et j ai peur qu ils fassent du mal à mon bébé...
Qui ?
Des hommes... qui d autre ? »
Après avoir hésité, je posai mon baluchon dans sa cahute, fit
siéger mon érable sur sa table basse et l observai alors qu elle
s occupait de son fils. Quand elle s endormit, sans avoir réussi à
me soutirer ne serait-ce qu une caresse, je la regardai encore,
subjugué par son innocence perdue.
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Comme elle me l avait dit, des hommes vinrent au beau
milieu de la nuit. Je saisis dans les braises la tige de métal que
j y avais plantée à la nuit tombée et, mon masque sur le visage,
je les dispersai, frappant assez fort, le plus souvent possible au
visage, pour qu ils n aient plus jamais envie de revenir et qu ils
soient marqués.
Une fois les assaillants enfuis, je ramassai dans la poussière
une oreille qu un de mes coups avait arrachée et la donnai aux
chiens errants qui se la disputèrent en jappant. Épuisé, je
m effondrai pour pleurer tant ma main droite me faisait mal. La
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